Figure emblématique du Pérou préhispanique, le Tumi est décliné en souvenirs de toute formes. Nul doute que vous en croiserez des tonnes lors d’un voyage dans le Sud Pérou et à Cusco (même si le Tumi est originaire du Nord Pérou) pourtant la plupart des commerçants ne savent pas ce qu’il représente. Je vous propose de découvrir dans ce dossier l’histoire et la signification des Tumis et notamment ceux de Lambayeque qui sont surement l’une des représentations les plus emblématique de l’ancien Pérou.
Les Tumis
Le terme Tumi est un mot Quechua qui signifie « couteau ». Les Tumis furent des couteaux utilisés durant l’époque préhispanique pour des sacrifices et comme ornements. Si les plus célèbres sont les incroyables Tumis de la civilisation Lambayeque (civilisation du nord Pérou qui a dominé l’actuelle région de Lambayeque entre le 8 eme et le 13 eme siècle), ils ont été également utilisés par les Mochicas, les Chimus et les Incas. Les caractéristiques communes à tous les Tumis sont un manche pouvant être orné ou non de décorations et une lame semi circulaire ou en demi lune avec le côté arrondi affûté.
Photo : Museo Larco Lima Photo : Museo Larco Lima Photo : Museo Oro del Peru Mucen Mucen Mucen Photo : Musée ethnographique de Berlin Photo : MET Museum New York
Les Tumis Lambayeque
Les plus célèbres Tumis sont sans conteste ceux retrouvé dans les sites archéologiques de Batan grande et du bosque de Pomac dans la région de Lambayeque. Ils sont parmis les plus fins et représentent tous un même personnage.

On à d’abord pensé que les Tumis Lambayeque représentaient un dieu ou un seigneur local. Depuis l’avancée des études sur la civilisation Lambayeque, les historiens pensent qu’il représente le personnage de Naymlap : le protagoniste d’un mythe retranscrit par l’espagnol Miguel Cabello de Valboa en 1586. Naymlap (aussi orthographié Naylamp, Ñamlap ou avec d’autre variantes) est l’ancêtre légendaire des Lambayeque qui arrive avec sa cour en bateau depuis l’océan Pacifique pour fonder la lignée des dirigeants de Lambayeque.

Depuis les années 1930, tous les tumis connus provenaient de pillage de tombes. Les premiers Tumis retrouvés in situ avec leur contexte funéraire ont été découverts seulement en 2006 dans le site archéologique du bosque de Pomac.

Description et analyse des Tumis Lambayeque
Le tumi Lambayeque est composé d’une lame semi circulaire en demi lune sur laquelle se dresse un personnage coiffé d’un diadème en demi lune. Le personnage possède des yeux en amande ou ailés et une bouche représentée par un trait avec des lèvres prononcées ainsi qu’un nez aquilin pouvant rappeler un bec d’oiseau. Le visage est similaire aux masques de la civilisation Lambayeque. Les parures d’oreilles rondes sont typiques des civilisations du nord Pérou. Sous les oreilles sont suspendus des oiseaux mythiques en position de piquée. Le corps est ornée de bracelets, collier et genouillères. Des ailes sortant de chaque côté du corps sous les épaules.
Mythe décrivant probablement l’arrivée de Naymlap représenté sous forme d’un oiseau – Huaca las Balsas Tucume Ornement en or représentant probablement Naymlap – Museo Bruning Lambayeque Ornement en or représentant probablement Naymlap – Museo Bruning Lambayeque Masque Lambayeque – Museo Bruning Lambayeque
Selon l’archéologue péruvien Federico Kauffman Doig, les ailes, le nez et les yeux sont des éléments ornithomorphes associant le personnage du Tumi au personnage légendaire de Naymlap (ce nom signifie oiseau de mer en langue muchik, langue préhispanique des civilisations du nord Pérou. Ñaiñ : oiseau La : mer). Le diadème en demi lune doit être interprété comme une représentation d’un croissant de lune montante, symbole féminin dans le monde préhispanique. Le personnage masculin quant à lui, doit être interprété comme la version Lambayeque du « dieu de l’eau » des anciens péruviens, personnage dont le but est de féconder sa contrepartie féminine, la terre mère. Toujours selon Kauffman Doig, les ornements du diadème et du personnage seraient tous associé à l’eau. Les sortes de S représentent la crête d’une vague (symbole classique de l’eau présent chez de nombreuses civilisations préhispanique), les formes de rondes représentent des gouttes d’eau et la couleur des pierres ornant le Tumi rappelle également l’eau.

de Kauffmann
Le Tumi d’Illimo : le plus CÉLÈBRE des Tumis péruviens
Le plus célèbre des Tumis à inspiré presque toutes les représentations iconographiques du Pérou. Son image est largement répandue au Pérou et on le retrouve sous toutes les formes dans les marchés touristiques du Pérou.

Le trésor d’Illimo (du nom de la province locale) a été découvert dans la Huaca las ventanas sur le site archéologique de Batan grande en 1936 par le huaquero Hipólito Granados Durán. Après avoir été prévenues, les autorités locales firent venir l’archéologue Julio C. Tello qui selon les versions de l’histoire confisque les objets ou se les voit confiés par le huaquero. Parmi les objets en or et cuivre doré se trouvaient trois Tumis dont un de particulièrement bonne facture et de grande valeur artistique qui restera connu sous le nom de « Tumi d’Illimo ».

Le Tumi est une représentation typique de Naylamp particulièrement fine et détaillée, il mesure 42 cm de haut et pèse 992 gr, il est totalement en or 24 carats et incrusté de pierres. Il va devenir l’une ses représentations les plus célèbres du Pérou préhispanique dans tout le pays. La fin de l’histoire du Tumi d’Illimo, volé et peut être détruit est un drame théâtral « à la péruvienne » ! J’ai trouvé peu d’informations fiables et plusieurs versions de l’histoire, étant donné les fautes des autorités péruviennes, on comprendra que l’histoire honteuse soit peu connue du grand public…
Le vol spectaculaire de 220 objets en or et en argent fût perpétré dans la salle de l’or du musée national d’archéologie et anthropologie du Pérou en 1981. La salle du musée possédait toutes les mesures de sécurité et les voleurs utilisèrent probablement un étroit conduit de ventilation. Le jour du vol, le directeur du musée allait voyager pour le Brésil. Lorsqu’il fut informé du vol il annula son voyage pour venir au musée mais ne pût que constater que l’alarme n’avait pas fonctionné à temps et que la police était arrivée trop tard sur les lieu (alors que le commissariat le plus proche est à 40 mètres du musée !). Les autorités commencèrent alors une véritable chasse impliquant de nombreux corps de police dans tout le pays mais sans succès. La plupart des versions de l’histoire coïncident sur le fait que le Tumi d’Illimo aurait été démantelé vendu en pièces, voir en or fondu. Certaines versions accusent des travailleurs du musée d’être à l’origine du vol (cas très courant au Pérou).
Où voir des Tumis ?
Si le Tumi d’Illimo n’existe plus, d’autres Tumis spectaculaires peuvent en revanche être vu dans les musées suivants. Notez que bien que l’un des Tumis du trésor d’Illimo soit conservé au musée national d’archéologie, il n’est à ma connaissance pas exposé, espérons qu’il entrera dans l’exposition permanente du futur musée d’archéologie de Lima !

Museo Oro del Peru – Jr. Alonso de Molina 1100, Santiago de Surco 15023
Sala de oro museo del banco central del peru (Mucen)

Museo del Banco Central de Peru (Mucen) – Jirón Ucayali 271, Cercado de Lima
Le saviez vous ?
- Le Tumi est l’une des figures les plus représentative du Pérou préhispanique, on en trouve en porte clefs, boucles d’oreilles, ornements, etc. dans tout le pays.
- Le Tumi remplace souvent le caducée comme logo des institutions médicales péruviennes. Cela vient du fait qu’il a souvent été considéré (sans preuve et probablement à tort) comme un outil utilisé par les peuples préhispanique pour les trépanations crâniennes.
- Le Tumi est tellement célèbre que des artisans Chilien en vendent des représentations a Valparaiso (alimentant au passage un énième conflit économique et culturel avec le Pérou).
- Le maire d’Illimo tente actuellement de faire rapatrier le Tumi restant du trésor d’Illimo (conservé à Lima) ainsi que d’autres pièces archéologiques conservées au musée Bruning de Lambayeque afin de les exposer dans un musée municipal de manière permanente et de les intégrer à l’identité locale de la population. Notez que cette manie péruvienne de faire « disparaître les pièces archéologiques dans les réserves des musées nationaux entretien une méfiance envers les archéologues chez les populations des villages et villes de provinces, en plus d’une sensation d’être dépossédés de leurs richesses culturelles.
- Si le terme Sican est parfois employé pour désigner la civilisation Lambayeque, après des débats d’historiens, le terme correcte à utiliser reste « Lambayeque », mot dérivé de Llampayec l’idole de Naymlap.
- L’une des premières pièces de 1 Sol de la collection Riqueza y orgullo del Peru represente le Tumi d’Illimo.
- Le Tumi est présent dans le dessin animé « Kuzco l’empereur mégalo » de Disney.
- Le Tumi est aussi le logo du blog Pérou préhispanique, dessiné par mes soins et inspiré du Tumi l’Illimo !



Sources
- Historia del tumi : symbolo de la medicina peruana y del colegio medico del Perú. Eden Galan Rodas, Caddie Laberiano Fernandez, Ciro Maguiña Vargas. Acta medica peruana v.29 n1, Lima, 2012.
- El tumi de Lambayeque, Federico Kauffman Doig, Quignam 2 :125-140
- http://www.scielo.org.pe/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S1728-59172012000100014
- http://www.laindustriadechiclayo.pe/noticia/1565156514-el-retorno-del-tumi-de-oro
- https://capital.pe/actualidad/video-denuncian-que-el-tumi-peruano-es-vendido-como-producto-cultural-de-chile-noticia-1059431
https://www.google.com/amp/s/intidomain.org/los-robos-por-encargo/amp/
super Article, très intéressant et surtout “juste” ! Bravo! Bonne continuation et longue vie à votre blog.
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Merci !
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